Rétrospective : les Goûteurs de livres du 15 avril 2019
Nous vous proposons de revenir sur quelques événements des années précédentes, histoire de vous mettre l'eau à la bouche et de vous donner envie de venir croquer la littérature à pleines dents avec les Goûteurs de livres, le club de lecture de la bibliothèque de Saint Félix ! Et comme toujours, retrouvez toutes les infos sur la page des Goûteurs (clic). Aujourd'hui, flash-back sur la réunion du 15 avril 2019 :
Les goûteurs présents : René, Yvette, Régine, Marie Jo, Françoise, Alice, Suzon, Danielle, Sylvie et Christel. Une pensée particulière pour notre goûteuse Elisabeth ce jour-là.
Trois jours et une vie, de Pierre Lemaitre
« À la fin de décembre 1999, une surprenante série d’évènements tragiques s’abattit sur Beauval, au premier rang desquels, bien sûr, la disparition du petit Rémi Desmedt. Dans cette région couverte de forêts, soumise à des rythmes lents, la disparition soudaine de cet enfant provoqua la stupeur et fut même considérée, par bien des habitants, comme le signe annonciateur des catastrophes à venir. Pour Antoine, qui fut au centre de ce drame, tout commença par la mort du chien… »
Marie Jo nous a fait une excellente présentation de ce livre :
Toute l’intrigue du livre tourne autour d’un fait divers tragiquement banal. Un enfant tue accidentellement un autre enfant, mais au lieu de tout de suite prévenir les adultes, il va d’abord penser à préserver sa mère du scandale que ne manquera pas de provoquer ce genre d’évènement dans la vie d’une femme aigrie par l’abandon de son mari. L’action se situe dans une petite ville de province où le qu’en-dira-t-on stigmatise irrémédiablement tout individu qui ne suit pas les règles de la bienséance locale.
À partir de là, les mensonges et les non-dits s’enchaînent d’un côté comme de l’autre et la vie de l’enfant bascule dans le cauchemar. Tous ces évènements ont lieu le 23 décembre 1999. Les recherches s’organisent pour retrouver le petit disparu, la solidarité des amis et voisins apparait sans failles…. Jusqu’au 26 décembre. Ce jour-là, s’abat sur la France la plus terrible et dévastatrice tempête du XXème siècle et la solidarité avec les parents de la petite victime est reléguée au second plan tant le traumatisme devant les ravages de la tempête est fort.
Le petit meurtrier est à la fois rongé de remords et rassuré, car il pense que le corps de sa victime a maintenant disparu. Il va poursuivre une scolarité endeuillée par son sentiment de culpabilité et quitter cette petite ville pour entreprendre des études de médecine (tiens, tiens ! un médecin soigne, préserve de la mort). Alors que sa nouvelle vie l’accapare et qu’il a trouvé une compagne, il revient voir sa mère pour un court week-end et se laisse séduire par une ancienne camarade de classe. À ce moment-là, la vie lui semble devenir légère, normale. Sauf que sa vie va de nouveau basculer sans qu’il n’y puisse rien y faire.
Tout le livre tourne autour du poids de la culpabilité, les conséquences d’un 1er mensonge qui en entraîne d’autres, inévitables. La personnalité de la mère est pour beaucoup dans le choix que fait l’enfant de cacher la vérité. C’est une femme blessée, qui ne cherche pas à se reconstruire après l’échec de son mariage, elle se crée un personnage de martyr et est la première à dénoncer « la mauvaise conduite » des autres. Le fait qu’elle passe tout son temps libre à briquer sa maison, comme si l’aspect impeccable de son intérieur était censé refléter celui de son comportement. L’enfant apprendra par la suite que cette mère qu’il a vue comme une sorte d’icône pure et sans tache a finalement bien trompé son monde. Les sentiments de trahison et d’isolement s’ajouteront alors à cette culpabilité qu’il traîne depuis l’enfance.
Le style de Pierre LEMAITRE est inimitable. Il arrive à décortiquer l’effrayante machinerie d’un destin implacable qui va broyer non seulement l’enfant, mais également l’adulte. Malgré la banalité de l’intrigue, on reste accroché au livre qui réserve des surprises jusqu’au mot FIN.
Certains se souviennent de l’avoir lu il y a très longtemps et gardent un souvenir intense de ce suspense. Cela a soulevé une discussion sur les personnages et la trame de l’auteur ; il y a une certaine similitude dans ses romans.
Le Lambeau, de Phillippe Lançon
Journaliste à Libération et chroniqueur à Charlie Hebdo, il est présent lors de la conférence de rédaction du journal satirique le 7 janvier 2015. Victime de l'attaque terroriste, gravement blessé au visage et aux bras, il est l'un des rares survivants. Le Lambeau retrace les moments tragiques de cette funeste matinée puis les mois d'hospitalisation dans le service de chirurgie maxillo-faciale de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière – notamment l'importance de sa relation à sa chirurgienne, Chloé Bertolus10 – et aux Invalides afin de récupérer une mâchoire fonctionnelle pour parler et manger ainsi que les lourdes conséquences psychologiques dues au traumatisme.
Ce livre n’est pas, comme il le laisse à penser, empli de voyeurisme, mais bien la reconstruction de l’avant et l’après, tout ceci avec une certaine dose d’humour. Et surtout dans une très belle écriture. Ce livre porte à réfléchir aussi sur notre vie, le sens que l’on veut lui donner. Il se finit sur l’annonce des attentats du 13 novembre 2015.
Vers la sobriété heureuse, de Pierre Rabhi
Pierre Rabhi a vingt ans à la fin des années 1950, lorsqu'il décide de se soustraire, par un retour à la terre, à la civilisation hors sol qu'a commencé à dessiner sous ses yeux ce que l'on nommera plus tard les Trente Glorieuses. En France, il contemple un triste spectacle : aux champs comme à l'usine, l'homme est invité à accepter une forme d'anéantissement personnel à seule fin que tourne la machine économique. L'économie ? Au lieu de gérer et répartir les ressources communes à l'humanité en déployant une vision à long terme, elle s'est contentée, dans sa recherche de croissance illimitée, d'élever la prédation au rang de science. Le lien viscéral avec la nature est rompu ; cette dernière n'est plus qu'un gisement de ressources à exploiter – et à épuiser. Au fil des expériences, une évidence s'impose : seul le choix de la modération de nos besoins et désirs, le choix d'une société libératrice et volontairement consentie, permettra de rompre avec cet ordre anthropophage appelé "mondialisation". Ainsi pourrons-nous remettre l'humain et la nature au cœur de nos préoccupations, et redonner enfin au monde légèreté et saveur.
Agriculteur, écrivain et penseur français, Pierre Rabhi est l'auteur d'une œuvre importante publiée notamment chez Actes Sud.
Sylvie a fait une belle présentation de ce livre en commençant par retracer la vie de l’auteur, puis nous a exposé ses constats et ses recommandations. Ce qui a suscité un débat, une expression est ressortie « le faut qu’on, y a qu’à », car pour certains ces recommandations restent encore utopiques. Tout le monde n’est pas prêt à vivre loin de toutes les innovations et à renier les avancées technologiques.
Après réflexion, il est évident que nous sommes dans une société de surconsommation et que certains principes de Pierre Rabhi peuvent être appliqués à notre quotidien. Vous l’aurez compris, cet ouvrage a suscité bien des questions et nous vous invitons à le lire de façon légère pour avancer dans votre questionnement face à notre société.
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